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Amplificateur Pathos TT

1°) Présentation générale :

Le Pathos TT est un amplificateur intégré fabriqué à partir de 1999 par la firme italienne Pathos, il a été décliné en trois versions : TT simple, TT avec télécommande et TT anniversery. Il est toujours en production (sous le type "anniversary") en 2019. Le prix du TT avec télécommande (qui sera présenté ici) était de 5500 euros.

Données constructeur :

Puissance de sortie : 2 x 35 W @ 8 Ohm

Pas de contre-réaction

Bande passante : 13 Hz - 78 kHz +/- 0,5 dB

THD < 0,5 % @ 35 W

SNR : 90 dB

SlewRate : 38 V/µs

Impédance d'entrée 100 kOhm

Puissance absorbée : 240 W

Masse : 44 kg

On remarque une puissance en W (quels W ?), et surtout des valeurs globalement assez voir très mauvaises : une DHT de 0,5 %  @ rated power, un SNR de 90 dB et un SlewRate de 38 V/µs c'est pas terrible... De plus ces mesures ne correspondent pas à ce que l'on trouve en réalité..

 

L'appareil est télécommandable pour sa partie volume uniquement. Il possède six entrées au format RCA toutes de haut niveau (pas d'entrées phono).

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2°) Conception :

a) Partie mécanique :

C'est pas mal fait, avec un bon assemblage au global. Certains choix sont complètement stupides : pieds en forme de cône (ce qui ne sert à rien, sauf à percer le support si celui-ci est en bois vu la masse de l'appareil).

b) Partie électronique :

Alors c'est là que c'est intéressant !! Compte tenu du côté "exemplarité en terme de blabla et d'enfumage technique", le paragraphe va être détaillé.

 

3°) Conception électronique :

a) Le "fameux" procédé Inpol ™ :

Pathos communique très fortement sur ce super circuit breveté par la société... Le brevet est disponible et correspond effectivement à ce qui est mis en place dans le TT, et il faut bien dire ce qui est : c'est un montage complètement inimaginable au XXI ème siècle : c'est totalement obsolète !!

Ci-dessous le brevet déposé :

 

On va surtout s'intéresser à la Fig 1 :

On voit qu'en fait on a un transistor FET (mais le principe serait le même avec un bipolaire), qui travaille en classe A en débitant sur une charge selfique, on prélève le signal aux bornes de la self via un condo quasiment obligatoire du fait de la présence du continu de polarisation. Ce schéma est paraît-t-il extraordinaire en terme de restitution sonore (voir le blabla qui accompagne le brevet).

En fait :

A) ce schéma est extrêmement ancien puisqu'on le trouve dans la revue Wireless World d'avril 1969 :

C'est le schéma du milieu (au bipolaire près et au fait que l'on charge sur le collecteur).

L'idée n'est donc pas neuve !!

Il est bon de rappeler ici qu'un brevet ne couvre pas une idée mais un procédé et surtout que le dépôt d'un brevet ne signifie pas qu'on est le premier à avoir eu l'idée du procédé breveté, on est simplement le premier a avoir eu l'idée de breveter le procédé (qui peut exister depuis des années (la preuve ci-dessus)) ! C'est une protection qui permet d'exiger une autorisation pour l'utilisation du procédé (autorisation très souvent payante), il s'agit donc avant tout d'une démarche commerciale et qui ne garantit en rien la validité du procédé (il y a des centaines de brevets de mouvements perpétuels déposés à l'INPI en France !!!)

 

B) Sur un plan électronique :

Ce procédé a été imaginé peu de temps après l'apparition des premiers transistors, comme une copie de la triode montée en classe A et débitant sur un transfo (les lampes ne débitent que sur des impédances élevées).

Cela dit le gros avantage des transistors est que justement ils peuvent débiter sur des impédances basses, et surtout qu'avec une alim symétrique et un push-pull on a pas besoin de condensateur d'isolement ! Tout ceci fait que ce type de montage a été très très vite abandonné. On le trouve dans quelques très vieux postes radio à transistors avec un petit transfo d'isolement entre bobine de charge et HP (en fait le HP contenait souvent les deux enroulements).

C'est un procédé qui a d'énormes défauts :

- très faible rendement

- très lourd et volumineux

- présence d'un condensateur de liaison

- très couteux

- si le montage n'est pas extrêmement bien fait (en particulier au niveau de la bobine de charge) on a une génération d'harmoniques très importante.

Il est quand même assez gratiné de voir que tous ces défauts sont listés dans le brevet comme étant justement évités par le procédé !!!!

Le schéma complet de la partie amplification de l'appareil est le suivant :

Ca n'a rien de bien compliqué :

- les deux triodes (une ECC83) font l'amplification en tension

- trois MOSFET sont polarisés en classe A via R13, 7 et 6

- le courant de polarisation des MOSFET traverse continuellement L1

- on attaque en tension les gate et l'amplification en courant se fait par les MOSFET

- on débite dans DEUX selfs : la self L1 et la self représentée par la charge reliée via condo de liaison.

- la capacité de liaison est très élevée ce qui permet de transférer un assez gros ampérage

- les MOSFET sont protégés par deux zéners

- il n'y a pas de CR (ce qui est une absurdité complète mais bon c'est un argument commercial formidable...).

- la liaison capacitive ainsi que L1 génère beaucoup de distorsion.

- un point positif : en cas de destruction avec CC des MOSFET, la liaison capacitive évite de façon certaine la destruction des HP.

 

Bilan des courses pour cette partie de l'appareil :

On a une électronique qui a un rapport qualité de restitution sonore / coût proche de zéro !!!

Pour le même coût il était possible de faire une très belle électronique genre push-pull classe A ou AB... et avec un résultat sonore bien meilleur, seul bémol : ça n'a rien d'extraordinaire et c'est déjà breveté !!! ;))

 

 

b) Reste de l'appareil :

La partie commutation de source est à rotacteur mécanique tout à fait basique avec néanmoins un bon point : il est situé près des entrées.

La partie commande de volume a là aussi été pensée pour faire original et THDG... et manque de bol le résultat n'est pas terrible ! Au lieu de prendre un potentiomètre motorisé tout simple (il en existe de très bonne qualité), Pathos a voulu faire de la résistance commutée. Pour cela soit on passe par un rotacteur entièrement mécanique (éventuellement motorisé) ou alors par un système à relais miniatures pilotés par un PIC (ou un CI spécialisé). C'est cette seconde solution qu'a choisie Pathos. Ca serait convaincant (encore que pourquoi passer par de la résistance commutée aujourd'hui alors qu'on sait fabriquer de très bons potentiomètres étanches à pistes cermet ?), mais le résultat est pitoyable : à chaque pas de commutation un "clic" se fait entendre DANS LES ENCEINTES !!! Super pour du THDG !!!

La partie alimentation est pas terrible du tout : très basique en ce qui concerne la partie HT pour les tubes et mal faite sur le plan pratique.

 

 

c) Qualité de fabrication de l'électronique :

C'est moyen pour un appareil de ce prix ! Le PCB est pas terrible (pistes mal faites, qui se décollent, routage mal pensé (un rattrapage en production a dû être fait... Preuve que la partie BE-Proto n'est pas géniale !). Les composants sont de qualité variable, mais rien d'exceptionnel.

 

 

 

3°) Problèmes à la réception :

Un canal ne fonctionne pas.

 

 

4°) Recherche des causes et dépannage :

Le problème est situé très en amont : la régulation de la HT tube a cessé d'être fonctionnelle, et le potentiel est monté (on était à 350 V au lieu de 320 V attendus), il y a eu un amorçage entre une piste et deux résistances situés sur l'ECC83 et les MOSFET derrière ont dégagés...

Le dépannage a consisté d'une part à reprendre la HT, le pb d'amorçage, les MOSFET etc., et à faire un préventif global sur cet appareil qui est en fait mal conçu du point de vu ventilation (contrairement aux apparences : très gros radiateurs, gros transfo...) !

 

 

5°) Le dépannage en images :

a) La carte d'alim HT et tempo :

On voit clairement des soudures qui ont surchauffées, et des pistes beaucoup trop petites.

 

Le PCB avec les traces de brûlures des diodes (qui étaient contre le PCB !!).

 

Carte en cours de réfection, reste à refaire une chaîne zéner qui dissipe correctement !!

 

La carte entièrement refaite avec des zéner sur-élevées par rapport au PCB et un doublage d'une d'entre elles.

Tous condos chimiques remplacés.

La tempo (relais et NE55) est là pour éviter d'envoyer l'alim BT des MOSFET avant que l'ensemble amplification en tension ne soit stable.

Même si l'appareil n'est pas jeune c'est sûr, il est anormal d'avoir une chauffe aussi importante. Ceci est dû en réalité à une implantation mal pensée (zéner contre le PCB et carte mal ventilée).

 

b) La carte de puissance et MOSFET :

On voit bien sur les photos ci-dessus le coup d'arc entre la résistance et une piste du PCB supportant les lampes.

Il est absurde de mettre aussi près des résistances couche métal d'un PCB avec de la HT sans protection.

 

Une façon simple de parer à toute formation d'arc : mettre de la gaine thermo sur les pattes et sur la résistance elle-même...

 

La carte principale (amplification).

On constate plusieurs choses :

- présence de MKT X2 (pointés en rouge) en parallèle des condo de liaison d'HP... C'est pas vraiment terrible du X2 pour de la modulation audio

- une fiche quatre points ne comporte que deux fils...

En fait en regardant de plus près la carte on se rend compte qu'il y a eu un plantage non détecté en BE et que finalement y a besoin que deux fils et qu'il va falloir faire une rustine (bypass avec patte de condo et coupure d'une piste) pour rattraper la sauce :).

 

Carte entièrement refaite (recapage électrochimiques et film).

Cerclé en jaune : le connecteur 4 points là où 2 points suffisent.

Cerclé en rouge : la rustine avec la patte du condo...

 

Super l'accessibilité pour souder sur la face qui se trouve sous le dessus... On ne peut pas faire autrement que de ne pas poser les gros condo de filtrage et de liaison HP, afin de passer la pointe du fer à travers les découpes...

 

Tout est remis en place, on peut fermer.

En haut à droite :

- encadré en rouge tout l'ensemble (il y a deux cartes enfichées) de commande du volume.

- encadré en jaune : la roue à secteur qui passe devant le capteur optique permettant ainsi la sélection des relais.

Les deux gros radiateurs noirs sortent de l'autre côté formant les "tours jumelles" (TT = Twin Towers), et supportent chacun trois MOSFET avec les résistance de gate et d'équilibrage de source.

 

Globalement dans l'absolu c'est pas mal, mais vraiment pas terrible compte tenu du prix !

 

 

6°) Essais et mesures :

a) Essais : classique sur charge ohmique pure de 8 ohms avec sinus et musique sur petits HP d'essais durant 2 h.

b) Mesures :

- BP :

La BP a été poussée jusqu'à 35 kHz, c'est vrai, mais reste qu'on est face à une courbe très mauvaise avec un effondrement dans les basses et une descente progressive des médium vers les aigües, autrement dit l'appareil ne restitue pas du tout au même niveau les différentes composantes du spectre fréquentiel du son...

b) Pmax avant écrêtage :

On est à 14,42 VRMS sous 8 ohms, soit à peu près 25 W continuous sin wave average power (les WRMS n'existant pas). On est en dessous des 35 W annoncés (mais bon, quels W ????).

c) DHT à 1 kHz sous 8 Ohms purs :

- à 3 "Wcswap" :

 

- à 25 Wcswap :

 

- à 29 Wcswap :

C'est calamiteux : on est à 1,02 % à 25 W et 2,88 % à 29 W.Et on a de tout : du pair et du impair...

Une oreille humaine standard entend la distorsion à partir de 0,5 %. Pour de la classe A c'est incroyable ! Soit ça vient des tubes, mais ça semble vraiment très élevé, soit ça vient de la topologie Inpol avec la self et l'absence de CR... C'est vraiment génial l'absence de contre-réaction... pour générer de la DHT à foison !!!

 

d) Bruit résiduel :

On est à 3,6 mVRMS, ça fait un peu beaucoup...

 

 

Les mesures sont donc globalement très mauvaises.

 

 

7°) Bilan :

Le procédé "Inpol" est un mauvais procédé, les résultats des mesures le montrent bien.

Concernant la fabrication de l'appareil : le fait de mettre une chaîne de zéners contre le PCB avec ce PCB en face cuivre vers le haut est une faute de conception élémentaire. Les clics des relais entendus dans les enceintes sont également liés à une mauvaise conception du circuit.

On est donc encore une fois face à un appareil dit "très haut de gamme" qui déforme le signal d'une façon très importante, chauffe énormément et présente des faibles de conceptions non négligeable et tout ça pour un coût très élevé.

Au final pour un prix aussi élevé il était possible de faire un très très bon amplificateur classe A avec un schéma éprouvé, mais bien sûr il était dés lors impossible de se prévaloir d'avoir développé un concept très original, performant et breveté.

 

 

8°) Statut :

Restitué à son propriétaire.

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Informations ici